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16320 kms plus loin...
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26 février 2010

Relevés sur le glacier

Aujourd'hui beaucoup de ceux qui étaient encore à Prud'Homme ont été ramenés à DDU. Parmi eux, Manu un chercheur du laboratoire de glaciologie de Grenoble nous a proposé, à moi et Adrien, d'aller sur le glacier de l'Astrolabe pour relever un profil de température sur toute son épaisseur.

Le 4 février dernier, Manu, Claire, Bruno et quelques uns de Prud'Homme sont allés sur le glacier pour faire un forage (c'était tout simplement de l'injection d'eau chaude qui faisait fondre la glace) jusqu'au socle et ils ont atteint la profondeur de 150 mètres. Ils ont ensuite équipé le trou de capteurs de température à différentes profondeurs. Il a fallu ensuite un certain temps pour que la température se stabilise. Ce temps nous a mené jusqu'à aujourd'hui et c'était alors le bon moment d'aller relever les données.

Vers 14H15, on monte dans l'hélicoptère qui nous transporte tous les trois sur le site expérimental. Toujours autant magique ces survols au-dessus du glacier. Une fois déposés, nous faisons les relevés. Pour rentrer un peu dans le détail, on avait avec nous un ohmmètre (qui permet de mesurer la résistivité) que l'on branchait à différents ports et ces valeurs de résistivité sont ensuite transformés en températures via des abaques. Cela n'a pas duré très longtemps et d'un côté tant mieux car un "petit" catabatique nous soufflait dans le dos et au milieu du glacier aucun endroit où se mettre à l'abri. Fort heureusement la neige ne volait qu'au niveau nos jambes, tant que ça n'atteint pas la tête ça va.

En Antarctique, on s'intéresse énormément à ces glaciers côtiers car ils drainent à eux seuls 90% de la glace de l'Antarctique vers les océans. Si je simplifie, on peut considérer que l'Antarctique est une baignoire au centre de laquelle tombe de la neige qui ensuite devient de la glace puis cette dernière sous l'effet de la topographie du continent, de la gravité... va s'écouler vers les côtes pour finir à la mer (il faut voir ça sur des milliers d'années). Et bien nos glaciers côtiers sont comme des robinets qui permettent de vider le continent de sa glace. Actuellement, on observe une augmentation du niveau de la mer entre 2 et 3 mm/an et la moitié est due à l'eau de fonte des glaciers (présents partout dans le monde). Dans une problématique aussi importante que celle du réchauffement climatique (et donc avec une augmentation du niveau de la mer) il est important de bien connaître l'influence de ces glaciers sur les variations du niveau de la mer.

L'Astrolabe est un petit glacier en Antarctique en comparaison par exemple avec celui du Mertz (qui est un véritable monstre situé non loin d'ici et qui pour information s'est disloqué, sur une petite partie, il y a quelques jours libérant quand même une plaque de 75 kms de long, sur 25 kms de large et 400 m d'épaisseur). Mais ce dernier est très difficile à suivre car aucune base scientifique n'est réellement à proximité et les moyens logistiques à mettre en oeuvre sont considérables. L'avantage de l'Astrolabe c'est que la base de DDU est juste à côté, ce qui facilite énormément les choses. De plus ces genres de glaciers, quelles que soient leurs tailles, ont à peu près le même fonctionnement et donc il "suffit" d'extrapoler les connaissances que l'on a sur l'Astrolabe pour comprendre la dynamique du Mertz (je simplifie bien mais c'est pas loin d'être ça).

Pour la petite anecdote si toute la glace de l'Antarctique de l'est se mettait à fondre complètement, le niveau des océans s'élèveraient de plus de 50 mètres (DDU sous les eaux et la plupart des îles aussi) mais cela n'arrivera jamais, c'est juste pour se donner une idée.

Pour revenir à l'Astrolabe, ses caractéristiques sont les suivantes : plus de 250 kms de long, 30 à 40 kms de large et une épaisseur qui varie énormément étant donné que selon l'endroit où l'on se se situe, cela peut aller de 150 m (là nous étions cet après-midi) à plus de 2 km (pas mal, hein). Au centre du glacier, il a été enregistré une vitesse d'avancement de 600 m/an et on estime que chaque année il relargue un peu plus de 0,5 km cube de glace.

En photo, étant donné que mon appareil a pris la neige durant le catabatique (un sac mal fermé mais il fonctionne toujours, ouf) je n'ai pas grand chose d'intéressant sur aujourd'hui, alors je mets une photo du continent prise lors de la découpe de la glace bleue mais c'est à peu près le même type de paysage. On voit nettement une bonne pente et ceci est dû au fait que l'antarctique est un continent très haut puisque sa hauteur moyenne est d'environ 2 kms. On peut comprendre que ça monte très vite au niveau de la côte.
Ah oui, l'avantage d'avoir du vent catabatique qui souffle c'est que le ciel est bien dégagé, excepté quand il ne provoque pas l'apparition de murs de neige, mais ça c'est une autre histoire.

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Commentaires
C
Explications très intéressantes et très compréhensibles pour une non scientifique. Une question : que va devenir ce morceau du Mertz ? Va-t-il dériver, fondre ? Tu as un poste d'observation de choix pour comprendre le réchauffement climatique et faire évoluer l'humanité au cours des prochaines décennies. Continue ....<br /> Bises d'une petite cousine de Lyon
A
Merci de continuer à nous donner des informations "in vivo", sur les différentes travaux scientifiques, et la vie au quotidien en Terre Adélie.<br /> <br /> Amicalement<br /> <br /> Alain AAEPF un lecteur assidu des blogs de DDU
M
Merveilleux et vivants commentaires techniques et<br /> instructifs. Passionnants et merci pour ce partage<br /> de connaissances. La lune... une carte postale de<br /> vacances de rêves! Affectueusement .MM.
16320 kms plus loin...
  • Ce blog me permet de faire partager mon voyage en Antarctique, sur la base de Dumont d'Urville. Il est dédié à ma famille, mes amis et tous ceux qui ont un jour rêvé d'aller en antarctique.
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